Une femme, victime d'un accident de la circulation, est grièvement blessée. Du fait de son accident, ses séquelles ne lui pemettent pas de reprendre son activité professionnelle. Elle est alors déclaré inapte à son travail et licenciée.
Son droit à indemnisation est alors contesté par le Fonds de garantie qui soulève deux questions :
- l'indemnisation des pertes de gains professionnels futurs (PGPF) est-elle subordonnée à la recherche d'un emploi ?
- une victime de répercussions professionnelles peut-elle être indemnisée à la fois des PGPF subies et d'une incidence professionnelle aux titres de la gène accrue au travail et de la dévalorisation sur le marché du travail ?
Par un arrêt du 14 janvier 2020, la Cour de cassation répond.
Inaptitude professionnelle après un accident : quelle indemnisation ?
Le 14 mai 2014, une femme est victime d’un accident de la route. Le conducteur responsable de l’accident était sous l’empire d’un état alcoolique et conduisait un véhicule sans assurance.
La victime de 41 ans, ouvrière dans un abattoir, souffre de multiples fractures aux vertèbres lombaires, aux côtes et au bassin avec un risque d’aggravation.
La victime est licenciée pour inaptitude à compter du 4 avril 2017.
Le fonds de garantie des assurances obligatoires (FGAO) conteste la décision de la cour d’appel qui alloue la somme de 306 792,35 € à la victime au titre de la perte de gains professionnels futurs (PGPF) ainsi que la somme de 30 000 € au titre de l’incidence professionnelle.
Le FGAO conteste le calcul de l’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs établi sur la base des salaires que la victime aurait perçus jusqu’à son départ à la retraite le 1er janvier 2039, au motif qu’elle n’était pas apte à reprendre une activité professionnelle dans les conditions antérieures.
Le fonds de garantie considère également que la Cour ne pouvait allouer la somme de 30 000 € au titre de l’incidence professionnelle en considération des difficultés de reconversion et de la pénibilité accrue au travail par suite des séquelles qu’elle conserve, après avoir indemnisé la PGPF sur la base d’une impossibilité de reprendre une activité.
Calcul des pertes de gains professionnels futurs : une indemnisation subordonnée à la recherche d'un emploi ?
Par arrêt du 14 janvier 2020 (N° 19-80 108), la chambre criminelle de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le FGAO :
« Pour fixer sur la base d’un euro de rente temporaire la perte de gains professionnels futurs de Mme X… pour la période du 1er janvier 2018 au 31 janvier 2039, date de la retraite, l’arrêt attaqué(…) énonce qu’elle a été licenciée pour inaptitude à compter du 4 avril 2017, et que lorsque l’inaptitude, consécutive à l’accident, est à l’origine du licenciement, il suffit de constater que la victime n’est pas apte à reprendre ses activités dans les conditions antérieures sans que cette dernière n’ait à justifier de la recherche d’un emploi compatible avec les préconisations de l’expert médical voire du médecin du travail(…)
En évaluant comme elle l’a fait la perte de gains professionnels futurs et dès lors qu’il résulte de ces constatations que la partie civile n’est plus, depuis la date de consolidation fixée par l’expert, en mesure d’exercer une activité professionnelle dans les conditions antérieures, la cour d’appel a justifié sa décision. (…)
Indemnisation de la perte de gains professionnels futurs en plus de l'incidence professionnelle !
La Haute juridiction précise que l’incidence professionnelle indemnise la dévaluation sur le marché du travail.
Pour fixer l’incidence professionnelle à une certaine somme, l’arrêt attaqué relève que suite à son licenciement pour inaptitude, Madame X… ne peut prétendre reprendre un travail comme celui exercé antérieurement à savoir manutentionnaires conditionnelles, le port de charges étend limité de même la station debout.
Les juges en déduisent, après avoir émis un doute sur la reconversion professionnelle, qu’il existe une dévalorisation sur le marché du travail.
En l’état de ces énonciations, la cour d’appel, a justifié sa décision ».
Ainsi, les pertes de gains professionnels futurs, imputables à l'accident de la route, doivent être indemnisées sans que la victime devenue inapte à son travail n'ait à justifier de la recherche d’un emploi.
De plus la Cour de cassation confirme que les PGPF et l'incidence professionnelle sont des postes autonomes et peuvent tous deux faire l'objet d'une indemnisation.