La Cour de Cassation, dans sa décision rendu le 24 mai 2018 (Civ. 2ème, n° 17-19.740) apporte des précisions quant aux méthodes de calcul du préjudice économique de l'enfant du défunt sur deux points :
- l'évaluation du revenu annuel du foyer qui servira de référence au calcul du préjudice économique
- l'âge de l'enfant à prendre en compte pour capitaliser son préjudice.
La Commission d'indemnisation des Victimes d'Infractions (CIVI) saisie pour indemniser la fille du défunt.
Dans cette affaire, Eric X... a été tué par deux personnes qui ont été déclarées coupables de meurtre par la cour d'assises du Var et condamnées à payer diverses sommes à Mme X..., fille de la victime, alors mineure.
Mme A..., agissant en qualité de représentante légale de sa fille, a saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) pour obtenir le paiement des condamnations civiles prononcées.
L'indemnisation du préjudice économique contestée
Contestant le mode de calcul et le montant du préjudice économique de sa fille, Mme A... a formé un recours devant la cour d'appel.
L'évaluation du préjudice économique de la fille de la victime décédée pose en l'espèce deux difficultés : l'évaluation du revenu annuel du foyer d'une part et l'âge de la jeune fille à prendre en compte pour capitaliser son préjudice économique d'autre part.
Vu l'article 706-3 du code de procédure pénale et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, la Cour de cassation tranche ainsi ces questions.
L'évaluation du revenu annuel du foyer
Attendu qu'en cas de décès de la victime directe, le préjudice patrimonial subi par l'ensemble de la famille proche du défunt doit être évalué en prenant en compte comme élément de référence le revenu annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné le décès de la victime directe en tenant compte de la part de consommation personnelle de celle-ci, et des revenus que continue à percevoir le conjoint, le partenaire d'un pacte civil de solidarité ou le concubin survivant.
Attendu que pour fixer à 237 701,92 euros le préjudice économique global subi par Mme X... (fille du défunt), et à 159 238,92 euros la somme lui revenant à ce titre, l'arrêt énonce, après avoir évalué les ressources annuelles d'Eric X... à la somme de 29 610 euros et celles de Mme A... à 18 774,84 euros, que le revenu annuel net du foyer était donc au jour du décès de ce dernier de 48 384,84 euros (29 610 euros + 18 774,84 euros), ramené à 43 152 euros pour rester dans la demande.
La part d'autoconsommation du défunt sera fixée à 20 % conformément à l'accord des parties sur ce point.
Le revenu disponible pour Mme A... et Mme X... avant le décès était donc de 34 521,60 euros (43 152 euros - 8 630,40 euros (43 152 euros x 20 %).
Sur ce revenu disponible, en fixant la part de consommation de Mme X... à 40 %, la perte annuelle pour celle-ci s'élève à 13 808,64 euros (34 521,60 euros x 40 %).
Qu'en statuant ainsi, en se fondant sur le seul revenu annuel du foyer avant le décès de la victime, déduction faite de la part de consommation personnelle du défunt, sans procéder à la comparaison de cette somme avec les revenus que continuait de percevoir Mme A... après le décès de son concubin, la cour d'appel a violé le texte et le principe de répartation intégrale sans perte ni profit pour la victime.
La capitalisation du préjudice en fonction de l'âge au jour de la décision.
Attendu que pour fixer à 237 701,92 euros le préjudice économique global subi par Mme X..., et à 159 238,92 euros la somme lui revenant à ce titre, l'arrêt énonce que la perte subie par Mme X... de la date de l'arrêt jusqu'à l'âge de 25 ans (âge limite non contesté par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions) doit être fixée par capitalisation en fonction de l'euro de rente temporaire pour une fille âgée de 16 ans à la liquidation, limitée à l'âge de 25 ans et selon le barème Gazette du Palais 2013 taux d'intérêts de 1,2 %, lequel est le plus approprié.
Qu'en statuant ainsi, alors que Mme X..., née le [...] , était âgée de 17 ans à la date de l'arrêt, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ; PAR CES MOTIFS, CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.-