Quel est le droit à indemnisation du conducteur éjecté de sa moto en cas de collisions successives ?
L'enjeu est de déterminer si le conducteur éjecté de sa moto conserve ou non la qualité de conducteur au moment où il heurte ultérieurement un véhicule.
Les conséquences juridiques sont essentielles car si le motard éjecté de sa moto est toujours considérée conducteur, son éventuelle faute pourra lui être opposée pour limiter ou exclure son droit à indemnisation.
En revanche, si le motard victime de cet accident de la route est désormais considéré comme non conducteur, l'indemnisation de son préjudice corporel sera totale sous réserve du cas rarissime de la faute inexcusable cause exclusive de l'accident qui seule pourrait lui être opposée.
La Cour de Cassation a pu trancher cette question le 24 mars 2016 (2ème civ. n°15-19416) à l'occasion d'un accident de moto avec collisions successives.
Accident de moto : le motard glisse et heurte un véhicule
Le conducteur de la moto a été victime d'un accident mortel de la circulation.
Le motard chute sur la chaussée avant d'être heurté par un véhicule circulant en sens inverse.
La famille assigne en responsabilité et indemnisation le conducteur du véhicule heurteur et son assureur.
Le motard tombé ou éjecté demeure conducteur...
Les ayants droit du motard décédé soutenaient qu'un motocycliste n'est plus conducteur lorsque, dans un premier temps, il est tombé de sa machine avant d'être heurté, dans un second temps, par un autre véhicule.
L'objectif était de démontrer que la succession de ces deux événements distincts avait engendré l'accident mortel et que la victime, au moment de la collision avec le véhicule, avait perdu sa qualité de conducteur lui permettant ainsi de ne pas se voir opposer sa faute.
Mais compte tenu des circonstances de cet accident de la route, la Cour suprême a estimé que la chute du conducteur sur la chaussée, puis sa collision avec le véhicule circulant en sens inverse s'étaient succédées dans un enchaînement continu et dans un laps de temps extrêmement bref, de sorte qu'il s'agissait d'un accident unique et que la victime n'avait pas perdu la qualité de conducteur.
Ainsi, dès lors que la chute ou encore l'éjection du conducteur et la collision ont eu lieu dans un même trait de temps, la jurisprudence considére que la succesion de collisions relève d'un seul et même accident de la route.
Exclusion du droit à indemnisation du motard
Le fait de conserver la qualité de conducteur fragilise le droit à indemnisation de la victime car sa faute peut lui être opposée ou être opposée aux ayants-droit en cas de décès.
Ainsi, la Cour de cassation a retenu une faute du conducteur de la moto en raison de sa chute résultant d'une perte de contrôle de son véhicule sur chaussée humide.
Cette faute a été opposée aux ayants-droit de la victime dont le droit à indemnisation a été exclu.